Un sursaut pour échapper aux passions tristes.
La haine doit être vaincue par l’amour et la générosité.
Baruch Spinoza
Notre Université d’été a été un grand succès. Nous nous sommes interrogés sur la capacité de la démocratie à affronter les défis d’aujourd’hui, et sur la nécessité d’un sursaut qui soit à la fois spirituel et démocratique. Cette question de la capacité de la démocratie à régler les questions auxquelles elle est confrontée était également au cœur des débats du 10ème anniversaire du Pacte civique. Avant cela, notre conviviale de juin nous avait permis d’aborder la situation politique nationale, avec Mathilde Imer, initiatrice de la Primaire populaire et avec Emmanuel Rivière de Kantar public (ex TNS Sofres), et ce à la double lumière de notre aspiration à la démocratie et de notre inspiration spirituelle. Vous ne trouverez pas dans cette lettre la synthèse de ces échanges, uniquement les conclusions qu’en a tirées Jean-Baptiste de Foucauld, mais l’ensemble du débat qui a été enregistré sera accessible prochainement sur notre site.
La confusion qui s’installe dans les débats d’une campagne présidentielle qui commence dans une ambiance délétère pourrait renforcer les inquiétudes qui se sont exprimées à ces différentes occasions. La montée dans les sondages d’un polémiste qui n’est pas officiellement candidat et qui a été condamné pour provocation à la discrimination raciale et pour provocation à la haine envers les musulmans en est la manifestation la plus récente. Peut-être n’est-ce qu’un feu de paille, comme le furent en leur temps les cotes de popularité d’un général de Villiers ou d’un professeur Raoult. Mais ce n’est pas sûr, et en tous cas révélateur, comme ces précédents militaires ou médicaux, de cette hystérisation des débats qui confine à la guerre civile oratoire, quand la polémique l’emporte sur l’échange d’arguments et la discussion sur les accords et les désaccords, et pourrait bien, selon les souhaits mêmes du polémiste, nous conduire à la guerre civile proprement dite.
La démocratie a été inventée pour régler autrement les désaccords et elle a conduit à la mise en place de techniques qui permettaient de les trancher pacifiquement. De même, le concept juridique de laïcité s’est construit sur le souvenir des plaies laissées par cette guerre civile que furent les guerres de religion. On assiste, à l’évidence, à un épuisement des techniques institutionnelles et juridiques qui ont permis de rendre effective cette volonté de « vivre ensemble », malgré les différences et les désaccords. Pour autant, les aspirations à la démocratie et à la laïcité restent fortes. Encore faut-il qu’elles ne soient pas inspirées par ces « passions tristes » que sont la haine, la peur, la colère, le mensonge ou la violence. Tel est l’enjeu de l’appel à un sursaut spirituel que nous préparons dans le prolongement de notre Université d’été.
Daniel Lenoir, Président de D&S.