Accueil > Lecture > 11L208: Han Kang : Impossibles adieux par Monika Wonneberger-Sander,

11L208: Han Kang : Impossibles adieux par Monika Wonneberger-Sander,

Han Kang : Impossibles adieux. Traduit du coréen par Kyungran Choi et Pierre Bisiou. Ed Grasset Paris, 2024

Prix Nobel de littérature 2024

 

Qu’est-ce qui fait que l’on soit sensible à un roman plutôt qu’à un autre ? Que l’on prenne plaisir à un texte loin de ses préoccupations quotidiennes, inattendu, poétique,  sauvage ? Étrange même ?

Comment résister à une phrase comme « c’est beau, mais l’électrode en moi censée transmettre le sentiment de cette beauté est endommagée, presque hors d’usage » (p. 30) qui exprime toute la souffrance de la narratrice ? Hantée par ses rêves noirs, elle compatit à la douleur de son amie Inseon gravement blessée par une maladresse et est prête à lui rendre service.

Elle accepte d’aller sauver le perroquet blanc de son amie nommé Ama, mot qui signifie « mère » en coréen, au risque de sa vie en pleine tempête de neige. C’est le début d’un long et périlleux voyage vers un passé enfoui, vers Jeju, le lieu du pire massacre que la Corée ait connu entre 1948 et 1949 où plus de 30 000 personnes ont trouvé la mort.

La tentation de se laisser mourir, enveloppée par la douceur mortelle de la neige, est grande. Le fantôme – son âme ? – de la mère, rôde,  l’a-t-elle soignée comme il convenait ? Ce passé est-il trop lourd à porter, est-il impossible de lui dire adieu ? « Est-ce que je veux revenir ? Existe-t-il un endroit où revenir ? » (p. 314) se demande-t-elle .

Le roman se termine sur une lueur d’espoir à l’image de cette phrase attribuée à Confucius :

« Notre plus grande gloire n’est pas de jamais tomber mais de nous relever chaque fois ».

J’ai été séduite par la finesse de l’écriture de l’auteur, son habilité à démêler les fils du passé, à mettre à nu les souffrances qui s’ajoutent les unes aux autres au cours d’une vie. Subtilement, elle réussit à introduire un brin de poésie dans ce récit pour réparer « l’électrode », à nous faire espérer la victoire de la beauté. Il faut faire silence pour goûter ce plaisir de lecture.

Mes félicitations aux traducteurs.

 

Monika Wonneberger-Sander, Janvier 2025

A propos Régis Moreira

Sur le même thème...

10L207: Pascal Chabot : Un sens à la vie. Enquête philosophique sur l’essentiel par Monika Wonneberger-Sander

Pascal Chabot : Un sens à la vie. Enquête philosophique sur l’essentiel. PUF, 2024   Le …

 

En continuant votre navigation, vous acceptez que ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Plus d'infos

En poursuivant votre navigation, vous consentez nous autoriser dans le but d'analyser notre audience et d'adapter notre site internet et son contenu pour qu'il réponde à vos attentes, que nous utilisions Google Analytics, service susceptible d'installer un ou plusieurs cookies sur votre ordinateur.

Fermer