Pierre Haroche : Dans la forge du monde – Comment le choc des puissances façonne l’Europe ; Fayard. 2024
Le lundi 6 mai, Pierre Haroche présentait son dernier livre à la Maison de l’Europe à Paris avec passion et humour. Assistons-nous à la chute de l’Europe ? Pierre Haroche se veut optimiste. Si l’Europe a façonné l’histoire mondiale, si l’histoire semble s’écrire ailleurs aujourd’hui, l’Europe n’a pas dit son dernier mot.
Ce qui a soudé l’Europe et par la suite l’Union européenne, est souvent l’adversaire extérieur. Au départ, après la fin de l’empire romain, le lien entre les États européens était la chrétienté, lien renforcé par la lutte contre l’empire ottoman. Puis les navigateurs européens ouvrent le continent au monde.
L’Europe exerce alors un pouvoir civilisationnel. Ce qui à terme a matériellement et idéologiquement armé le reste de l’humanité contre elle, et après la deuxième guerre mondiale, les grandes puissances la dominent et la partagent en deux blocs.
Les « empires déchus » comme les appelle l’auteur, se cherchent alors une communauté alternative. L’Europe comme revanche ? « L’Europe s’unifie dans la mesure où elle perd son statut de centre du monde ». Le nouveau défi pour les Européens face à Asia first s’intitule « mobilisez-vous, aidez-vous vous-mêmes », cela devrait la motiver et l’endurcir pour l’avenir. « Comme si le monde, qui d’une main venait d’arracher son sceptre à l’Europe, lui rendait, de l’autre, en compensation, un miroir ». Un saut vers le large ? Naissance d’un esprit de résistance ? L’auteur va plus loin en écrivant « L’UE est poussé par le monde à se penser et à se comporter comme une puissance ».
Il peut être intéressant de compléter la lecture par le passionnant document d’Amin Maalouf : « Le labyrinthe des égarés » (Grasset) qui prend comme point de départ l’actuelle guerre en Europe, pour analyser la naissance et la chute des empires du passé, le Japon, la Chine, la Russie, en souligner la fragilité et la force. Et le livre de Jean-François Colosimo : Occident, ennemi mondial n° 1 (Albin Michel) qui évoque la mutation des anciens empires européens.
Le passé pour éclairer et nourrir l’actualité. Fini les lamentations, fini « courage, fuyons » ce sera « courage avançons ensemble ».
M.W-S.