Lu dans un quotidien du 26.8.19 :
La Commune de Septfonds a accueilli plusieurs familles de réfugiés yazidis, persécutés en Irak pour des raisons religieuses.
Commentaire d’un internaute :
Je propose d’aller à la Mairie de Septfonds aujourd’hui pendant « la manifestation de bienvenue » et de les foutre dehors… Et pourquoi ne pas brûler le maire au passage ?
Poster cela, c’est vouloir tuer quelqu’un de manière virtuelle, la seule disponible si l’on veut éviter la prison. Déverser sa haine sur internet permet d’assassiner quotidiennement, recommencer à volonté, se complaire sans fin dans la délectation de dénier à quelqu’un le droit de vivre.
En même temps, la haine jette une lumière crue sur la personne qui profère ces menaces, elle est habitée par une force négative, déshumanisante qui la rend immobile, ses certitudes ne permettent plus aucune transformation. L’autre, le différent, ne l’intéresse pas, il ne vaut rien à ses yeux, il se sert de la haine comme acte destructeur de son humanité, de l’accusation comme outil de manipulation.
Que lui opposer ? L’amour créateur, positif, lumineux sera inefficace face à la force destructrice de la haine, leurs origines respectives n’ont rien en commun. L’indifférence alors ? Difficile à générer dans une situation aussi éprouvante.
La compassion peut-être, fruit d’un long et peut-être douloureux chemin intérieur, oui la compassion pour l’autre, le malheureux, déshumanisé.
Aujourd’hui, n’importe qui peut déverser son mal de vivre, sa mauvaise humeur sur internet. Tranquille, derrière son écran, l’utilisateur se sent en force pour dénier à l’autre, à une institution, un responsable, son voisin, le droit de vivre de et d’agir.
La haine n’a pas de définition ni d’existence dans le droit positif français (sauf incitation à la haine raciale) mais l’état réagit au déferlement de haine sur internet par « La loi contre les contenus haineux sur Internet (dite « loi Avia ») (qui) est une proposition de loi française destinée à retirer certains contenus haineux sous 24 h des réseaux sociaux, des plates-formes collaboratives et des moteurs de recherche. Le texte est adopté par l’Assemblée nationale le 9 juillet 2019. »
La difficulté réside, entre autres, dans le fait que cela dépend de la dénonciation des internautes qui sont par définition subjectifs. Il faudra attendre la mise en place de la loi avant de juger « l’arbre à ses fruits ».
Le problème s’ancre dans l’acceptation, ou non, de la différence, dans la capacité de chacun de respecter l’autre tel qu’il est, d’être ouvert à l’altérité. Le refus de la différence naît le plus souvent de l’incompréhension, de la comparaison ou de la peur. Chaque personne est unique, elle ne peut être réduite à un acte, il n’y a aucun jugement de valeur à porter. Avec le philosophe Levinas, on peut dire qu’il s’agit de trouver la juste distance.
L’enfer, ce sont les autres disons-nous quelques fois : les autres sont ce que je ne suis pas, ils me rappellent que je suis limitée, et pourtant je ne peux être moi-même qu’entouré d’autres êtres même si je ne les comprends pas toujours.
L’enfer c’est moi aussi quand je m’enferme sur moi, ne laissant plus aucune place à autrui.
Nous avons besoin les uns des autres, tout dépend du regard que nous portons sur le prochain. Parlons-nous… se parler pour dénouer, ouvrir, comprendre avec humour et si possible un peu d’amour.
Ce haïku est né un jour de colère :
La haine déboule – stridente
Une voix singulière – violente
Une crue de colère.
La vague immense
Éclate sur le sable
S’écoule et s’absorbe.
Retour de la paix ?
L’amour est puissant.
Monika 24.8.19